Patrick Baudry, le second Français à voyager en orbite autour de la Terre, nous raconte l’exploration spatiale. Entretien extrait de Les Others Magazine Volume II.
[dropcap]A[/dropcap]u XVIIIe siècle, la surface de la Terre avait encore beaucoup à nous apprendre. Vous pouviez choisir de devenir explorateur, de parcourir le monde à la recherche de recoins isolés et être le premier à en fouler le sol. Si c’était encore probablement vrai au XIXe, voire même au début du XXe, il est désormais acquis que notre monde ne recèle plus de région méconnue. Les grands explorateurs n’occupent aujourd’hui plus que les livres d’Histoire et les contes pour enfants. Pour satisfaire sa soif de conquête et partir à la recherche de ses origines, l’Homme s’est donc tourné vers l’espace.
En rejoignant la mission américaine Discovery en 1985, Patrick Baudry devint le second Français à voyager en orbite autour de la Terre. Une expérience qui le métamorphosera à tout jamais. Nous l’avons rencontré à Lacanau, dans le sud-ouest de la France, pour revenir avec lui sur cet événement, discuter de la place de l’Homme dans l’univers et faire un point sur la conquête spatiale internationale. Ambassadeur de bonne volonté de l’UNESCO, il nous a aussi détaillé le sens de ses actions pour les enfants, en Europe et en Afrique. Entretien fleuve.
Quelle a été votre première relation avec le monde de l’aviation ?
Quand j’étais petit, mon père était ingénieur météo et travaillait sur les aéroports, à Casablanca, à Alger, puis à Mérignac en France. Ça a été le point de départ. Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours rêvé de voler et de devenir pilote.
À quoi ressemble votre parcours ?
Si on a la chance d’avoir une vocation, il suffit de suivre le chemin qui nous est tracé. Dans mon cas, la voie la plus facile pour atteindre mon but, qui était la plus difficile sur le plan des études, était de faire une grande école d’ingénieurs, une école de pilotes puis l’école de l’air. Ensuite, je suis devenu pilote de chasse et j’ai réussi un concours pour devenir pilote d’essai. Cela représentait beaucoup de travail et de sacrifices, mais le jeu en valait vraiment la chandelle.
Depuis le début, votre rêve était de vous rendre dans l’espace ?
Pas du tout. L’espace m’attirait, mais je ne voyais pas comment, en tant que Français, j’allais pouvoir y accéder. Jusqu’à la veille de l’appel à candidature du CNES pour qu’un citoyen français rejoigne une mission soviétique, ce n’était même pas un sujet.
Ça l’est vite devenu ensuite, évidemment. J’ai rempli mon dossier puis passé les mois suivants à enchaîner les épreuves physiques, mentales, les tests psychologiques et les visites médicales. J’ai finalement été sélectionné avec mon ami Jean-Loup Chrétien pour intégrer la Cité des Étoiles, le centre d’entraînement des cosmonautes russes.
Comment s’est passée votre expérience là-bas ?
C’était comme entrer en religion. On pénétrait dans une cathédrale. À cette époque, c’était la guerre froide, et pour deux militaires d’origine, se retrouver chez les soviétiques, c’était très spécial politiquement. Spécial mais grandiose. Les Russes avaient bien avancé sur le projet, les Américains étaient déjà allés sur la Lune… On avait l’impression d’être à un tournant majeur, c’était magique. Et les Soviétiques ont été fabuleux, sur le plan professionnel mais également humain. On travaillait avec des types qu’on admirait beaucoup. Certains d’eux étaient déjà allés dans l’espace, ça nous impliquait énormément. C’était très dur mais comme diraient les sportifs d’aujourd’hui, “c’était que du bonheur”. Je savais depuis le départ que ne volerais que si mon aîné Jean-Loup, plus gradé que moi, rencontrait un problème. Je l’espérais vraiment d’ailleurs (rires). Mais je savais aussi que si la mission se déroulait comme prévu, je serais tout en haut de la liste pour le prochain départ. Tout a fonctionné parfaitement, il a été le premier Français à visiter l’espace et ça m’a permis de rejoindre quelques mois plus tard une mission américaine.
Ça s’est déroulé aussi bien que chez les Russes ?
Au départ, pas vraiment. J’ai d’abord été intégré à la mission Challenger, dont le vol était sans cesse reporté à cause de problèmes techniques, pour finalement être complètement annulé. Entre temps, je suis rentré en France pour répondre aux accusations d’espionnage dont j’étais alors victime dans la presse du fait de mon séjour à la Cité des Étoiles. Une fois blanchi, je suis reparti au États-Unis pour m’entraîner sur la mission Discovery. Cette fois, c’était la bonne ! Malheureusement, quelques mois plus tard, Challenger explosait au décollage, entraînant la perte de tout son équipage.
Que ressentez-vous les jours précédant le tir de Discovery ?
Avant le départ, on se sent heureux, tout simplement. On est un peu comme un gamin à l’approche des grandes vacances. On profite de chaque instant.
Comment s’est passé le décollage et l’arrivée dans l’espace ?
Le décollage, c’est assez dantesque. Il y a énormément d’étapes mais pour résumer, cela commence par le célèbre compte à rebours, puis vient l’allumage des moteurs, suivi d’une vraie explosion qui fait vibrer toute la machine, tout le corps. À partir de là, on vit une accélération de 9 minutes pendant lesquelles on passe de 0 à 30 000 km/h. Une accélération aussi longue, c’est le bonheur absolu, on voudrait que cela ne s’arrête jamais. Une fois sortis de l’atmosphère et arrivés dans le vide spatial en une poignée de minutes donc, les moteurs s’éteignent. Il faut normalement attendre un moment avant de détacher sa ceinture mais je n’ai pas pu résister à l’envie de flotter dans la cabine. Vous ne pesez rien, vous vous déplacez sans effort. Cela crée une sensation de liberté totale. Premier réflexe, s’approcher d’un hublot accessible pour regarder dehors et là… C’est encore plus beau que tout ce que vous aviez pu imaginer.
À quoi ressemble une journée type dans l’espace ?
Sur un vol court, sept jours dans mon cas, les journées sont très chargées. On vit en fonction de notre montre. Sur 24 heures, on a 16 heures de travail et 8 heures de repos. Dans la période de travail, on bosse le plus possible. De mon côté, je faisais diverses expériences physiques, d’acclimatation du corps à l’apesanteur… On prend aussi trois repas de quinze minutes, qui nous permettent de discuter un peu. Pendant les périodes de repos, on s’occupe. Il est très difficile de dormir au départ car, contrairement au sol où il y a un relâchement du corps sur un support, là-haut, vous fermez les yeux et il ne se passe rien. Mais comme on doit préserver le calme des autres, on en profite pour réfléchir et écouter de la musique dans son Walkman, collé au hublot. J’avais amené l’album Breakfast in America de Supertramp et Les Quatre Saisons de Vivaldi. Observer la Terre, les lumières et l’espace avec ce genre de morceaux dans les oreilles, ça prenait une dimension épique.
La lumière est spéciale dans l’espace ?
La lumière représente la vie, notre existence. Quand on est sur Terre, il y a beaucoup d’éléments : les arbres, la route, les immeubles… Là-haut, vous avez la Terre et vous avez l’espace. Donc la lumière joue un rôle crucial. Elle est vraiment différente, beaucoup plus “pure” puisqu’on est hors de l’atmosphère. En orbite, il y a un jour et une nuit toutes les 90 minutes. La dizaine de secondes que prend le soleil pour se lever vous offre une palette de couleurs très variées, toutes plus belles les unes que les autres, et une intensité lumineuse hors-du-commun. Un spectacle incroyable, rejoué seize fois toutes les 24 heures.
Avant la mission, vous avez milité pour amener du vin à bord de la navette.
Le Coca-Cola était sur le point de partir, et je trouvais ça dommage qu’il arrive là-haut avant le vin, qui représente notre culture, notre savoir-faire et même une partie de l’histoire de l’Humanité. Donc j’ai tout fait pour qu’il parte avec nous, de manière symbolique, et j’ai réussi. On n’en a pas profité malheureusement, car on ne boit pas d’alcool à bord des vaisseaux américains. Ça aurait sûrement été différent avec les Russes (rires).
Comment s’est passé le retour ? Vous aviez dans l’idée de repartir un jour ?
Qu’on y passe sept jours ou six mois, on regrette tous de devoir rentrer si vite. Tout s’arrête d’un coup, c’est un peu triste. Et puisqu’on est vraiment obnubilés par notre travail, le temps passe très vite. Mais je n’avais pas décidé de repartir, non. J’avais appréhendé tout cela avec un état d’esprit réaliste et assez constructif en définitive. J’avais en tête la conquête spatiale au sens propre, une conquête collective à laquelle je participais au côté de personnes que j’admirais. Je pensais sincèrement qu’on était au début de quelque chose de très grand.
Cela n’a finalement pas été le cas ?
En 1985, avec les budgets de l’époque, la stratégie la plus logique et rentable pour les vols habités était d’aller s’installer sur la Lune à l’échéance 1995, puis de se lancer dans l’exploration de Mars entre 2000 et 2005. Il était temps de franchir le pas. Mais l’importance des lobbies et les enjeux économiques cachés derrière la navette, qui comme son nom l’indique, sert à faire des aller-retours entre la Terre et les stations spatiales, ont convaincu les Américains de continuer à l’utiliser. Pour justifier ces coûts, ils ont donc construit ISS, la Station Spatiale Internationale, et ont commencé à y envoyer des scientifiques, la plupart bien trop compétents pour ce qu’ils y font réellement. Aujourd’hui, on tourne en rond autour de la Terre depuis plus d’un demi-siècle. On envoie des robots. C’est bien, ce sont de beaux objets, mais qui coûtent trois milliards de dollars pour, dans le cas de Curiosity, ne parcourir que 80 mètres dans l’année. On ne peut pas appeler ça “conquérir”. Pour avancer significativement, il faudrait envoyer des humains là-bas, mais cela nécessiterait une vraie décision politique, qui peut impliquer mort d’homme. Aujourd’hui, les dirigeants ne préfèrent pas faire de vagues. Une chose est sûre, les problèmes qui empêchent la conquête spatiale d’avancer ne sont ni financiers, ni technologiques.
Quels sont, selon vous, les caractères qui font que l’Homme explore ?
C’est la curiosité qui pousse l’Homme à explorer le monde. Le besoin de savoir, le désir de connaître. Cela le pousse à dépasser ses limites pour découvrir un territoire, qu’il soit géographique ou intellectuel. Aucun autre être vivant n’en est doué, et c’est pour ça qu’elle est importante, car elle fait la noblesse de notre espèce. Subsidiairement, elle nous permet de rêver, et donc de vivre. C’est un pilier fondamental de notre existence. Pour moi, les véritables responsables du progrès sont ceux qui inventent, qui bâtissent, et qui rendent les choses possibles matériellement, pas ceux qui dirigent les États et signent les enveloppes budgétaires.
Quelles étaient vos motivations personnelles pour explorer l’espace ?
L’histoire de l’Humanité a toujours progressé en trois étapes. La première, c’est l’exploration au sens pur, comme l’a fait Christophe Colomb, pour ne citer que le plus célèbre. Ensuite, il y a la phase d’occupation, pendant laquelle on apprend à vivre sur le nouveau territoire fraîchement découvert. On s’organise, on survit. Vient pour finir la phase de colonisation, où l’on se développe et exploite le nouveau territoire afin d’en tirer des bénéfices. Celle qui m’intéresse, personnellement, c’est la phase exploratoire. Cela fait partie de mon caractère. Là par exemple, au loin, je vois la dune qui cache l’océan. Je ne pourrais pas vivre sans savoir ce qu’il y a de l’autre coté de cette dune. J’aurais taillé un arbre et traversé le lac pour le découvrir. C’est cela qui m’anime. Avec ce voyage dans l’espace, une partie de mes rêves s’est réalisée. Et même si on n’avance plus beaucoup aujourd’hui, ça finira bien par reprendre sérieusement.
Quel souvenir vous a laissé ce voyage ?
Je le compare souvent à une naissance. D’abord, il y a une période de gestation assez longue, puis vient le voyage, et enfin le retour. À partir de là, on passe dans une autre vie. On remet l’Homme à sa place dans l’univers et on analyse les choses avec plus de recul. Quand on voit la Terre depuis l’extérieur, on assiste au paradoxe très violent entre la puissance de notre égo, notre conscience d’exister, et l’évidence de notre non-importance, donc de notre non-existence. Quand, en plus, on imagine ce que représente la durée de vie d’un être humain par rapport à celle de l’univers, que l’on ne connait pas d’ailleurs, on se rend compte de notre petitesse. Vous ne pouvez plus voir votre propre vie de la même manière quand vous avez admis l’évidence, non pas qu’elle ne servait à rien, car c’est un terme très relatif, mais qu’elle n’avait aucune importance. Même Mozart, le plus grand bienfaiteur de l’Humanité, n’a fait que passer, alors que c’est lui qui nous a laissé le plus somptueux patrimoine. Avec cette vision globale du monde, on essaye de faire des choses qui comptent, pour le bien de tous.
Pouvez-vous nous décrire un peu le Space Camp, justement ?
Dans la majeure partie de l’Europe, on a très facilement accès à l’éducation, mais il faut aider les gamins à trouver leurs voies. Il n’y a rien de pire que d’aller à l’école sans savoir pourquoi. Le but du Space Camp est entièrement pédagogique et vise à faire comprendre à ces enfants un certain nombre de phénomènes physiques et astronomiques à travers des activités dynamiques calquées sur la Cité des Étoiles. Un enfant qui a un rêve, un but, est un enfant sauvé. C’est un stage d’une semaine qui, même s’il n’a pas le même impact sur tout le monde, a déjà participé à créer beaucoup de vocations.
Quelle est votre mission au sein de l’UNESCO ?
À l’image du Space Camp, je me suis toujours engagé auprès des enfants, principalement en Afrique, pour créer des écoles, des centres et de nombreux projets pédagogiques. Parmi ceux que l’on a menés à bien, il y a notamment l’AVU – African Virtual University – qui vise à passer des accords avec des universités pour dispenser des cours diplômants de niveau ingénieur à des étudiants dans 35 pays aujourd’hui. On travaille aussi sur de plus petits projets, comme celui qu’on a mis en place au Niger avec une association qui se nomme Les Puits du Désert. Le but est de forer un puits afin de dégager du temps aux enfants, qui en profitent pour aller à l’école qu’on se charge de leur construire également. La première chose qu’il faut apporter aux enfants dans le monde, à part à manger bien sûr, c’est l’éducation, de manière à ce qu’ils puissent s’inscrire dans un avenir moins incertain que celui qui est le leur actuellement.
Comment imaginez-vous ce futur justement ? Quelle Terre pourront observer les astronautes dans quelques dizaines d’années ?
Il y a deux visions, une pessimiste et une optimiste. La première est conforme à ce que l’on voit aujourd’hui, c’est-à-dire qu’en tant qu’espèce fragile, on se dirige vers une disparition de la possibilité de vivre à la surface de la Terre. C’est quasi-inéluctable quand on analyse l’évolution des choses. La seconde, l’optimiste donc, veut qu’on ait identifié des solutions avant que la situation ne devienne trop critique. Si on ne peut pas s’empêcher de détruire la planète qui nous accueille, on progresse aussi chaque jour dans de nombreux domaines, notamment ceux des technologies et ses sciences sociales. Je suis plutôt dans ce camp, mais il ne va pas falloir traîner. Ces problématiques sont vraiment captivantes et la manière dont nous allons les traiter dans le futur l’est au moins autant. Je dirais que la seule chose dont je suis sûr, c’est que nous ne cesserons pas d’assister à des événements passionnants.
Propos recueillis par Thomas Firh.
Photos par Simon Meheust.
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[dropcap]T[/dropcap]he surface of the Earth still had a great deal to teach us during the 17th century. You could choose to become an explorer, to scour the globe’s most secluded nooks and crannies and be the first to set foot upon them. If this was still the case during the 19th century, even at the beginning of the 20th, there aren’t any unexplored regions left on today’s map of the world. Nowadays, great explorers can only be found in history books and children’s tales. So, in order to satisfy his thirst for conquest and search for his origins, Man set his eager eyes on space.
By joining the American Discovery mission in 1985, Patrick Baudry became the second Frenchman to travel in orbit around the Earth, an experience that would change him forever. We met with him in Lacanau, in the southwest of France, to look back on this event, chat about man’s place in the universe, and weigh up on the global space race. A UNESCO Goodwill Ambassador, he also talked about the meaning of his actions helping children in Europe and Africa.
How did you discover the world of aviation?
When I was young, my father was a meteorologist and used to work for airports in Casablanca, in Algiers, then in Mérignac in France. That was the starting point. I always dreamed of flying and becoming a pilot for as long as I can remember.
Can you tell us about your journey?
If you’re lucky enough to have a vocation, all it takes is to follow a path. In my case, the easiest path that could take me towards my goal was to go to an engineering ‘Grande Ecole’, then to Flight School, and finally to an Air Force Academy. After that, I became a fighter pilot and I passed an exam to become a test pilot. I worked very hard and had to make many sacrifices, but everything was worth it in the end.
Was your dream to go to space from the start?
Not at all. I was attracted to space, but I couldn’t see how, as a Frenchman, I could possibly go. Right up until the day before the CNES (National Space Studies Center) launched its call for applications for a French citizen to join a Soviet mission, it wasn’t even a talking point. It quickly became one afterwards, of course. I filled in my application form and spent the following months doing physical and mental trials, sitting psychological tests and having medical check-ups. I was eventually chosen, along with my friend Jean-Loup Chrétien, to join Star City, the Russian astronaut training center.
What was your experience like over there?
It was like going into the ministry. We were entering a cathedral. At that time, the Cold War was going on, and for two original servicemen to end up working amongst the Soviets, it was incredibly special, politically speaking. Special but grandiose. The Russians had already advanced on the project, the Americans had already gone to the moon; we felt we were at a major turning point, it was magical. And the soviets were fabulous, professionally but also humanely speaking. We were working with guys we really admired. Some had already been to space, that really got us involved. It was very hard, but as today’s athletes say, it was just pure bliss. I knew from the get go that I would only get to fly if older Jean-Loup, higher ranked than I, encountered a problem. Actually, I really hoped he would (laughs). But I also knew that if the mission was carried out as planned, I’d be at the top of the list for the next voyage. Everything worked out perfectly, he was the first Frenchman to visit space and it enabled me to join the American mission.
Did everything go as well as it did with the Russians?
At the beginning, not really. I was integrated to the Challenger mission at first, but its flight was constantly being postponed due to technical problems, until it was completely cancelled altogether. In the meantime, I came back to France to answer spying accusations I was victim of in the press because of my trip to Star City. Once cleared, I headed back to the States to train for the Discovery mission. My time had finally come. A few months later, Challenger exploded at takeoff, killing its entire crew.
What emotions travelled through your body preceding the Discovery launch?
Before departure, you simply feel happy. You’re like a kid just before summer vacation. You make the most of each and every moment.
How was the takeoff and arrival in space?
Takeoff is quite Dantesque. There are lots and lots of stages, but to summarize, it starts off with the famous countdown, then the engines are fired up, followed by a real explosion that causes the entire machine, your entire body, to vibrate. From then on, there’s a nine minute acceleration, when you go from 0 to 30,000km/h. Such acceleration is just pure bliss, you never want it to end. In just a handful of minutes, you’re out of the atmosphere and in the vacuum of space, and the engines turn off. You usually have to wait a while before taking your seatbelt off, but I just couldn’t resist the urge to float around the cabin. You don’t weigh anything, you move around effortlessly. It creates a sensation of total freedom. Your first reflex is to go up to an accessible porthole to look out of and then… it’s even more beautiful than anything you could ever imagine.
What’s a typical day in space like?
During a short flight, seven days in my case, the days are incredibly busy. You live according to your watch. Across twenty-four hours, sixteen hours are dedicated to work, and eight hours to rest. You work as much as you can during the work period. I’d do various physics experiments, the body’s acclimatization to weightlessness, etc. You also have three fifteen minute meals that enable you to chat a little. During your rest periods, you keep yourself busy. It’s very difficult to sleep in the beginning because, unlike on the ground where your body relaxes on a surface, up there, you shut your eyes and nothing happens. But as you have to make sure you don’t disturb the others, you use that time to think and listen to music, glued to the porthole. I brought Supertramp’s Breakfast in America, and Vivaldi’s Four Seasons albums with me. Looking at the Earth, the lights and space with that kind of music in your ears, gave everything such an epic dimension.
Is there a particular light in space?
Light is life, it’s our life, and it is very different up there. When you’re on Earth, there are lots of different elements: trees, roads, buildings. Up there, you have Earth and you have space. So light plays a crucial role. It’s a lot purer because you’re out of the atmosphere. Besides, in orbit, there is a day and a night every ninety minutes. The ten seconds it takes for the sun to rise offers a very varied color palette, each color more beautiful than the last, and an outstanding luminous intensity. And you can make the most of the show sixteen times every twenty-four hours.
Before the mission, you were militantly in favor of bringing a bottle of wine on board the shuttle.
Coca-Cola was about to take off, and I thought it would be a shame if it arrived up there before wine, which represents our culture, our savoir-faire, and even a part of the history of humanity. So I did everything in my power to take some wine with me, in a symbolic way, and I succeeded. We didn’t make the most of it, unfortunately, as you can’t drink any alcohol on American spaceships. I’m sure it would have been a different story with the Russians (laughs).
What was the trip back like? Did you ever consider going back one day?
Whether you spend seven days or six months up there, you regret having to return so quickly. Everything stops at once, and it’s a little sad. And because you’re so obsessed by your work, time goes by very quickly. But then, I didn’t decide to go back.
I eventually saw everything with a very realistic and quite constructive frame of mind. What I had in mind was the conquest of space, literally. A collective conquest to which I participated, along with people I admired. I sincerely believed we were at the beginning of something very big.
Was that not the case in the end?
In 1985, with the budgets at the time, the most logical and cost effective strategy for manned flights was to go and live on the moon by 1995, then to start exploring Mars from 2000 to 2005. It was high time we took the plunge. But the importance of lobbies and economic stakes hidden behind the shuttle, which, as its name suggests, is used to go back and forth between Earth and space stations, convinced the Americans to continue using it. In order to justify these costs, they built ISS, the International Space Station, and began sending scientists, most of them overqualified for what they were actually doing there. We’ve been going round in circles around the Earth now for more than half a century. We send robots. That’s good, they’re beautiful objects. But robots that cost three billion dollars to build, and only cover 80 meters per year, as it is the case for Curiosity. We can’t call that conquering. In order to move forward significantly, we would need to send humans over there, but that would require a true political decision, which could entail the loss of life. Nowadays, politicians prefer not to make waves. One thing is sure, the problems that prevent the spatial conquest from making progress are neither financial, nor technological.
What do you think are the character traits that make men want to explore?
Curiosity is what pushes men to explore the world. The desire for knowledge, the need to know. That’s what pushes men to go beyond their boundaries to discover a territory, whether it be geographical or intellectual. No other living being is capable of that, and that’s why it’s important, because it’s what makes the nobility of our species. Additionally, it allows us to dream, and thus to live. It’s a fundamental pillar of our existence. For me, the true people responsible for progress are those who invent, build, and eventually make things materially possible, not those who run countries and vote budgets.
What were your personal motivations to explore space?
The history of humanity has always progressed in three stages. First comes exploration in the pure sense of the word, like Christopher Columbus did, to name the most famous one. Then, there is the occupation phase, where you learn to live on a new, freshly discovered territory. You organize yourself, you survive. Finally comes the colonizing phase, where you develop and exploit the new territory to benefit from it. The stage that I am personally interested in is the exploratory phase. It’s part of my character. There, in the distance, I can see the dune that hides the ocean. I could not go on living without knowing what’s on the other side of that dune. I would have cut down a tree and crossed a lake to find out. That’s what drives me. Part of my dream came true with that journey into space. And even if we’re not entirely moving forward today, eventually, everything will resume seriously.
What memories do you have of that journey?
I often compare it to a birth. First, there is a fairly long gestation period, then the journey, and finally the return. From then on, you head on into another life. Man is put back into perspective in the universe and things are analyzed with the wisdom of hindsight. When you see Earth from space, you witness the very violent paradox between the power of your ego, your consciousness of existing, and the evidence of your non-importance, therefore of your non-existence. When, moreover, you think of what a human being’s lifespan represents compared to the universe’s, which, besides, is still unknown, you become aware of your minuteness. You can’t see your own life in the same way once you’ve admitted what’s obvious, not that it’s of no use, because that’s a very relative term, but that it didn’t have any importance. Even Mozart, humanity’s biggest benefactor, was only just passing through, whereas he’s the one who bestowed on us the most sumptuous heritage. With that global vision of the world, we try to do things that matter, for the good of all.
As it happens, can you describe the Space Camp to us?
In most places in Europe, access to education is easy, but you have to help the kids find their way. There’s nothing worse than going to school without knowing why. Space Camp’s goal is entirely educational, and aims to help these children understand a number of physical and astronomical phenomenon through dynamic activities modeled on those from Star City. A child who has a dream, a goal, is a child who is saved. It’s a one week course that, even if it doesn’t have the same impact on everybody, has already participated in the creation of many vocations.
What is your mission within UNESCO?
Just like with the Space Camp, I have always committed to children, mainly in Africa, in order to create schools, centers and many educational projects. The AVU (African Virtual University) is probably our most accomplished project. Its aim is to make agreements with universities, so that they may deliver diploma-giving lessons at an engineer level to students in thirty-five countries today. We’re also working on smaller projects, like the one we set up in Niger with an association called Les Puits du Désert (The Wells of the Desert). The goal is to drill a well, so that the children have more time to go to school, a school which we’re also building. The first thing children need in the world, aside from food of course, is education, so that they can be granted a better future than the one they have at the moment.
How do you imagine the future? What kind of Earth will astronauts be able to observe in the coming decades?
There are two visions, one is pessimistic and the other optimistic. The first is in compliance with what you see nowadays, which tends to prove that, as a fragile species, we’re heading towards the disappearance of the possibility to live on the surface of the Earth. It’s almost inevitable when you analyze the evolution of things. The second, optimistic then, sees us identifying the solutions before the situation becomes too critical. If we can’t refrain from destroying the planet that welcomes us, every day we can progress in many different domains, notably technologies and social sciences. I see myself more in that camp, but we’ll have to hurry up. These problems are truly captivating and the way we’re going to face them in the future is just as enthralling. I’d say the only thing I’m sure of, is that we will continue to witness the most exhilarating events.
Words by Thomas Firh.
Photos by Simon Meheust.
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