Par Solene Roge
Guide : de Paris jusqu’à la mer, par la vallée de la Seine
Temps de lecture : 15 minutes
Saviez-vous qu’on peut faire le tour de la France sans quitter l’eau ? Notre pays possède en effet le plus grand réseau navigable d’Europe, avec 8 500 kilomètres de voies, des canaux aux rivières en passant par les fleuves, dont la Seine, évidemment.
Quand on évoque la Seine, l’image de Paris vient à coup sûr en tête. Pourtant, le deuxième plus long fleuve français traverse une dizaine de départements sur près de 777 kilomètres avant de se jeter dans la Manche ! Creusée par l’eau pendant des millions d’années, la vallée de la Seine dessine un territoire à part, qui a attiré les citadins dès l’arrivée du train puis des congés payés, en quête de nouveaux horizons et de repos, loin de la ville.
Quelques jours loin du métro, de la pollution et des bruits, dans un coin de nature complètement dépaysant mais facilement accessible, aux portes de Paris… Voilà exactement ce qu’il nous fallait en ce début d’été. Cap à l’Ouest, avec la mer en ligne de mire et la Seine comme itinéraire.
De ce voyage au fil de l’eau, on vous rapporte un guide complet de la vallée de la Seine, avec des conseils et itinéraires, réalisé en partenariat avec Voies navigables de France. Vous pourrez aussi retrouver d’autres photos et informations dans le 9e volume de notre magazine papier.
Trois itinéraires
On début ce guide de la vallée de la seine par trois idées d’itinéraires en fonction de la durée de votre aventure. Vous retrouverez les informations sur chacun des lieux et activités dans la suite.
Une journée : de Chatou à Saint-Germain-en-Laye
Embarquez avec votre vélo dans le RER A de bon matin pour vous rendre à Chatou pour découvrir l’univers des Impressionnistes, prendre un café sur le balcon de la Fournaise et admirer les vieux bateaux retapés par l’association Sequana. Reprenez le RER jusqu’à Saint-Germain-en-Laye, où vous pourrez vous perdre dans la forêt domaniale, visiter le château et son musée, et profiter de la vue sur la vallée avant de rentrer.
Un week-end : Vernon et les Andelys
Jour 1 : Prenez le train de Saint-Lazare jusqu’à Vernon (45 à 55 minutes) pour visiter la fondation Monet avant de déjeuner au bord de l’eau, près du Vieux Moulin. Repartez à vélo pour deux bonnes heures de balade le long du fleuve, jusqu’aux Andelys. Montez au Château Gaillard pour profiter des dernières lumières du jour.
Jour 2 : Le lendemain, partez pour une randonnée dans les environs, une session d’escalade à Val-Saint-Martin ou une promenade sur la Seine. Rendez vous enfin à Saint-Pierre-du-Vouvray ou à Gaillon pour reprendre le train jusqu’à Paris.
Trois jours : de Rouen à la mer
Jour 1 : Partez en train avec votre vélo, jusqu’à Rouen. Profitez des ruelles pavés, de la cathédrale et pique-niquez sur les quais avant de pédaler jusqu’à Jumièges.
Jour 2 : Remontez en selle pour suivre les routes des fruits et des chaumières, jusqu’au marais Vernier et une session d’observation de la faune.
Jour 3 : Passez la journée au Havre, entre l’architecture et la plage, avant de reprendre le train en direction de Paris.
Quand y aller ?
La vallée de la Seine est agréable à tout moment de l’année. Bien que la période d’avril à septembre est plus propice pour profiter de températures idéales à vélo ou sur l’eau. Au printemps, les jardins et les vergers sont en fleurs. On comprend alors pourquoi Monet et les Impressionnistes sont venus prendre inspiration par ici ! À la fin de l’été, les maraîchers récoltent leurs fameuses pommes normandes que l’on goûte directement au bord des sentiers.
Mais quelque soit la période, la météo peut vous surprendre, et passer rapidement d’un grand soleil à un ciel orageux. La lumière, toujours changeante, participe indéniablement à la beauté des lieux, et a de quoi ravir les photographes. Mais on n’oublie pas son k-way !
Comment se déplacer ?
Il est bien entendu possible de découvrir la vallée de la Seine en voiture. Comme vous le savez, ce n’est pas vraiment notre moyen de locomotion préféré. La région est facilement accessible en transport en commun, alors autant en profiter !
En train
La voie ferrée est le moyen privilégié des citadins pour partir vers la Manche depuis près d’un siècle.
Pour commencer votre voyage depuis Paris, rien de plus facile. Le RER A vous emmène à Chatou et Saint-Germain-en-Laye en moins de 30 minutes depuis Châtelet. Comptez 1h15 de train en moyenne pour atteindre Rouen et 2h15 pour Le Havre au départ de Saint-Lazare. Il existe d’ailleurs un Pass Normandie Découverte à 20€ pour deux adultes qui permet de circuler librement pendant plusieurs jours sur toute la Normandie, dans les trains, cars TER, Bus Région et Intercités.
À vélo
L’un des meilleurs moyens de circuler tout en profitant des paysages et en restant au plus près de l’eau, c’est le vélo. Les pistes cyclables d’aujourd’hui sont souvent d’anciens chemins de halage. Ils permettaient autrefois aux chevaux et aux hommes de tirer les barges depuis la rive.
Dès 2020, il sera d’ailleurs possible de relier Paris à la mer sans quitter sa selle avec le projet La Seine à Vélo. Soit, près de 430 kilomètres d’itinéraires cyclables le long du fleuve et à travers 130 communes. En attendant, des kilomètres de véloroutes et voies vertes existent déjà :
- De Paris à Conflans-Sainte-Honorine, via l’Avenue Verte London-Paris, via le canal Saint-Denis. Cet itinéraire entièrement balisé permet de rallier les deux capitales via la Normandie et le ferry de Dieppe à Newhaven. La première partie est commune à celle de la Seine à Vélo.
- La Seine à Vélo en Seine-Maritime : cet itinéraire est déjà aménagé sur 120 kilomètres, de Elbeuf jusqu’au Havre, avec des traversées du fleuve en bacs gratuits.
À pied
Les chemins de halage, très agréables pour les vélo, le sont tout autant pour les randonneurs. D’ailleurs, sachez que le GR2 ou Sentier de la Seine parcourt plus de 850 kilomètres en suivant le cours du fleuve, de ses sources à la Manche. Il vous faudra tout de même poser quelques RTT si vous voulez atteindre Le Havre à pied… mais c’est une belle aventure à organiser !
[quote]Conflans-Sainte-Honorine est la capitale des bateliers, dont le métier consiste à piloter un bateau, une péniche, un pousseur ou un convoi fluvial.[/quote]
En bateau
Enfin, qui dit voie navigable dit bateau, bien entendu. Si vous avez la chance de posséder le vôtre et du permis de plaisance obligatoire, il vous faudra vous acquitter d’une vignette. Vous pouvez en faire l’acquisition directement sur le site de Voies Navigables de France. Renseignez-vous au maximum sur les écluses qui jalonnent votre parcours et les règles de circulation. En effet, la Seine est l’un des fleuves les plus empruntés d’Europe !
Vous pouvez aussi louer un bateau à un particulier sur les sites dédiés ou embarquer sur un paquebot fluvial. Pendant notre voyage, nous avons ainsi relié Laroche-Guyon à Rouen à bord d’un bateau de Croisieurope. Si nous n’aurions pas forcément opté pour ce moyen de locomotion au premier abord. Nous y avons fait de très belles rencontres et profité d’une vue exceptionnelle sur le fleuve encore embrumé aux premières lueurs du jour.
Que faire ?
Maintenant que vous savez quand et comment vous rendre dans la vallée de la Seine. Voici quelques idées d’activités à faire pour profiter de toutes ses richesses.
Prendre un bon bain de nature
De Paris jusqu’à l’estuaire, la vallée de la Seine forme l’une des plus grandes continuités paysagères, naturelles et écologiques de France. Ce territoire façonné par les eaux est un important réservoir de biodiversité. Chaque type de paysage, (côtes, vallées, rives, boucles, tourbières, îles ou coteaux) correspond à un milieu abritant une flore et une faune spécifiques et parfois rares. On y trouve de nombreux périmètres de protections réglementaires, comme les parcs naturels régionaux du Vexin français et des Boucles de la Seine.
[quote]Une grande partie du territoire de la vallée de la Seine s’inscrit dans le réseau européen Natura 2000.[/quote]
L’un des sites les plus remarquables du Vexin français est la réserve naturelle des Coteaux de la Seine. Ce site forme un vaste amphithéâtre naturel aux reliefs escarpés et lumineux. Près de 500 espèces y ont été recensées dont 14 protégées, avec des faucons pélerins, passereaux, papillons Bel-Argus, chauves-souris et lézards verts qui profitent des coteaux exposés plein Sud.
Le Parc naturel régional des Boucles de la Seine, plus en aval, protège un vaste ensemble de forêts et milieux humides comme le marais Vernier et ses 4 500 hectares situés sur un important couloir de migration des oiseaux. On y observe des cigognes, hirondelles, balbuzards et faucons pèlerins, mais aussi des vaches écossaises et des chevaux camarguais à l’état semi-sauvage. Introduits ici dans les années 1970, ils participent à l’équilibre naturel du marais.
Randonner à pied, à vélo ou en VTT
Pour profiter au mieux de toutes ces espaces de nature protégée, rien de tel que la randonnée !
On vous en parlait un peu plus haut, mais que vous en parcouriez une portion ou la totalité, le GR2 qui relie Dijon à la mer le long de la Seine sur plus de 850 kilomètres est un très bel itinéraire à suivre pour découvrir les méandres du fleuve.
Le Parc naturel régional des Boucles de la Seine à lui seul propose 1 200 km de sentiers de randonnée balisés entre vallées, falaises, coteaux, plateaux, forêts et marais dont :
- La Route des Fruits : 62 kilomètres qui épousent parfaitement la courbe de la Seine autour de la presqu’île de Jumièges, là où un microclimat permet aux pommes poires, prunes et cerises de mûrir en toute quiétude, avant qu’on ne vienne les acheter directement “à la barrière”, dans les paniers des maraichers.
- La Route des Chaumières : elle complète parfaitement la précédente avec 53 kilomètres jusqu’aux confins du marais Vernier, par Vatteville, Aizier, Vieux-Port et la forêt de Brotonne et à la découverte de l’habitat traditionnel, fait de torchis, bois, pierre et roseaux locaux.
Les adeptes de la randonnée en VTT trouveront aussi de quoi se faire plaisir, notamment du côté du Pays de Caux et de la forêt de Brotonne, avec plus de 275 kilomètres de sentiers balisés de difficultés et dénivelés variés.
Les pieds dans l’eau
Voile, aviron, canoë ou pêche à la mouche, la Seine est sans conteste le terrain de jeu parfait pour se mouiller.
[quote]Autrefois, on pouvait assister au phénomène du mascaret, une vague pouvant atteindre 2,50 mètres de haut et 25 km/h ![/quote]
Au milieu du XIXe siècle, le canotage devient un loisir prisé des Parisiens. Nombreux sont ceux qui fuient la capitale pour prendre du bon temps loin de la ville. De grands auteurs comme Maupassant ou Zola se sont essayés à ce loisir. Cette activité s’est d’ailleurs perpétuée jusqu’à aujourd’hui. Notamment à Chatou, où l’association Sequana remet à flot de vieux bateaux : voiliers, chaloupe à vapeur, yoles, canoës… Nous y avons rencontré Guy et Bertrand. Deux bénévoles amoureux de la Seine qui ouvrent volontiers les portes de leur atelier.
Il en est de même pour la pêche : si vous pouvez trouver de nombreuses espèces de poisson dans la Seine, dont des anguilles, truites et brochets, sa pratique est réglementée. Il vous faudra notamment une carte de pêche fluviale. Sachez aussi que le fleuve est classé en eau de deuxième catégorie et que la consommation des prises est interdite.
Prendre de la hauteur
Pour les grimpeurs, impossible d’ignorer ces falaises de craie et silex qui nous toisent depuis le départ. En creusant la vallée, la Seine a aussi façonné quelques spots d’escalade bien agréables. Ceux-ci sont facilement accessibles et regroupés autour de la boucle des Andelys :
- Val-Saint-Martin et Le Petit-Andely (Les Andelys) : sportif, 150 voies, 3a / 6c, max 35 mètres. N’hésitez pas à contacter Tête en l’Air, le club d’escalade des Andelys, qui organise des sorties en falaises.
- La Roque (Le Thuit) : un ensemble de 4 sites côte à côte (Microfalaise, Spéléo, Bisexto, Le Thuit), sportif, 150 voies, 4c / 8a+, max 30 mètres.
- Connelles et L’ M (Vatteville) : terrain d’aventure, 100 voies, 3c / 7c, max 40 mètres.
Le topo Escalade dans l’Eure et Bords de Seine, disponible à l’Office de Tourisme des Andelys ou Au Vieux Campeur à Paris, vous donnera toutes les informations nécessaires.
Un peu de culture
Si la nature a déjà de quoi nous offrir tout un panel d’activités. Elle a aussi grandement participé à l’histoire de la vallée, que l’on découvre au détour d’une randonnée ou entre deux portions à vélo.
Tout commence au pied de nombreux châteaux de la Seine, comme celui de Saint-Germain-en-Laye qui accueille le Musée d’Archéologie Nationale, le Château de Laroche-Guyon, entre Moyen-Age et Renaissance, ou le Château Gaillard érigé en 1196 par Richard Cœur de Lion. Une ambiance médiévale que l’on retrouve à Vernon, avec le Vieux Moulin bâti au XVIe siècle sur un pont.
[quote]Petit conseil : pour prendre des photos du Vieux Moulin de Vernon dans la brume, allez-y tôt le matin.[/quote]
Les impressionnistes
Il est bien entendu impossible de passer par la vallée de la Seine sans parler des Impressionnistes. De l’île de Chatou à la Maison de Monet et tout au fil de notre voyage, on comprend facilement l’attrait que la région a pu exercer sur ces artistes venus peindre “à même la nature”. Et pour en savoir plus sur l’histoire de la Basse-Seine de ses hommes et de ses paysages, nous avons aussi visité MuséoSeine, à Caudebec-en-Caux. Un petit musée les pieds dans l’eau où le phénomène du mascaret nous a passionnés, tout comme les bateliers et autres métiers du fleuve.
Enfin, de Paris jusqu’au Havre, l’architecture a aussi su éveiller notre curiosité. On quitte la capitale pour des villages, leurs petites places ensoleillées et leurs clochers, jusqu’aux ruelles pavées de Rouen. Arrivés au Havre, l’ambiance est différente mais tout aussi captivante, devant la modernité imaginée par l’architecte Auguste Perret.
Face à la mer, les pieds dans le sable : on est arrivés !
Où dormir ?
Le bivouac étant interdit sur le territoire de la vallée de la Seine, nous avons fait l’expérience des maisons d’hôtes durant notre voyage. Cette alternative permet de vivre auprès des habitants, d’échanger de bons conseils et de rencontrer des voyageurs, comme au relais de Chaussy, où nous avons partagé un délicieux dîner avec une famille en route pour relier Paris à Dieppe à vélo via la voie London-Paris.
L’offre de maisons et tables d’hôte étant très développée dans la région. Vous n’aurez aucun mal à trouver votre bonheur, mais n’hésitez pas à réserver à l’avance, surtout en été.
Quelques liens utiles
- Yvelines tourisme
- Office de tourisme Saint Germain Boucles de Seine
- Office de Tourisme de Conflans-Sainte-Honorine
- Val d’Oise Tourisme
- Rouen Normandie Tourisme & Congrès
- Eure Tourisme
- Office de tourisme Nouvelle Normandie
- Caux Seine Tourisme
- Seine Maritime Attractivité
- Office de tourisme Pont Audemer
- Le Havre Etretat Normandie Tourisme
Photos : Charly Derouet
En partenariat avec
Voies navigables de France
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