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Face à la photo de Une de cet article, vous avez probablement pensé avec plus ou moins d’agacement : « Je connais cet endroit ! » Le rocher de Trolltunga est devenu un incontournable de la photographie outdoor, capturé des centaines de milliers de fois et tout autant partagé sur les réseaux sociaux.
Que penser de cette uniformisation des destinations et des photographies qui les représentent ? Quels impacts les réseaux sociaux ont-ils sur notre créativité, notre façon de voyager et d’appréhender le monde, mais aussi et surtout sur l’environnement ?
Une réflexion omniprésente chez Les Others, que nous avons partagé avec vous dans un essai publié dans notre huitième volume papier, aujourd’hui dupliqué en ligne.
Un jour de septembre 2015 apparaissait sur Instagram la photographie d’une tente de campeur soigneusement installée en pleine forêt. Celle-ci est curieusement perchée sur le tronc coupé d’un arbre mort. Luisa, 28 ans, inaugurait avec ce cliché @YouDidNotSleepThere (« Tu n’as pas dormi ici »), un compte dédié à « la célébration des spots de camping les plus absurdes » de la plateforme sociale. Bivy bags étendus aux bords de précipices, tentes installées derrière des cascades de glace ou sur le fameux rocher de Trolltunga en Norvège. Il y en a depuis pour tous les goûts en matière de camping sensationnel et scénarisé. Une catégorie photographique cruellement dépourvue d’authenticité et pourtant devenue reine sur Instagram. C’est ce phénomène, que Luisa a décidé de dénoncer avec un léger sarcasme et une forte dose de second degré.
Expérience sociale ou caricature du nouveau monde de l’art. Cette initiative se veut en tout cas le reflet de ce que pourrait devenir la photographie outdoor en ligne si l’on n’y prenait garde. La création répétée et incontrôlée d’un contenu paradoxalement éloigné de toute réalité. Une image devenue un tableau pré-monté, pensée pour plaire au plus grand nombre. Autrefois objectif principal des responsables marketing, le taux d’engagement d’un contenu digital (nombre de « likes », partages ou commentaires générés par une publication) serait aujourd’hui devenu le Saint Graal de toute personne inscrite sur un réseau social. Une recette mise au point par les équipes de Mark Zuckerberg sous couvert d’inciter à la publication de contenu de qualité. Malheureusement, les effets sur la créativité et la responsabilité environnementale des photographes se font de plus en plus sentir.
C’est un sujet de réflexion omniprésent chez Les Others. Parce qu’il questionne notre propre responsabilité en tant que créateurs, curateurs et diffuseurs de contenus. Nous ne prétendons pas dicter au travers de ces lignes une marche à suivre. Au contraire, nous souhaitons poser un regard subjectif et ouvert sur un sujet important. Car cette thématique définit plus qu’on ne le croit le voyage d’aujourd’hui et l’aventure de demain.
L’innovation hyper-accélérée en matière de smartphone et la multiplication des applications de retouche ont rendu en quelques années la photographie disponible à un niveau quasi-professionnel à plus de 2,5 milliards de personnes, soit plus d’un quart de la population mondiale.
L’innovation hyper-accélérée en matière de smartphone a rendu la photographie disponible à un niveau quasi-professionnel à plus de 2,5 milliards de personnes.
Les plateformes sociales, Instagram en tête de file, ont quant à elles inauguré une nouvelle galerie d’art mondiale à ciel ouvert. Capable de contenir, diffuser et promouvoir une nouvelle typologie de contenu produit en masse, partout et par tout le monde. Chaque seconde, ce sont des milliers de photographies qui sont hébergées par la plateforme. 95 millions par jour pour être exact. Une bibliothèque colossale et d’une richesse infinie.
D’où vient alors le sentiment de déjà-vu qu’il nous arrive de rencontrer en parcourant notre fil d’actualité ? Un thermos de café versé en POV dans un mug en inox, un aventurier perché sur un pont suspendu devant une forêt de sapins ou une jeune femme assise les pieds dans le vide sur le rocher de Trolltunga (encore lui)… Ces scènes, qui vous sont forcément familières si vous êtes abonnés depuis plus d’une semaine à des chaînes de voyage ou d’aventure, ont multiplié leurs apparitions sur Instagram ces dernières années, emportant bien souvent des milliers de « likes » sur leurs passages. L’algorithme du réseau social, principalement basé sur l’engagement de sa communauté, programmerait-il les « nouveaux voyageurs » à produire partout dans le monde un contenu qu’ils savent déjà attrayant ?
En 2011, l’entrepreneur et militant progressiste américain Eli Pariser développait dans un livre devenu best-seller — The Filter Bubble — le concept de la bulle de filtrage. Selon lui, les progrès fulgurants des algorithmes cachés derrière la personnalisation des fils d’information et des résultats de recherche en ligne risqueraient à terme de nuire au débat politique. Optimisés pour encourager l’engagement de l’utilisateur, les algorithmes en charge de notre fil d’actualité nous présenteraient en priorité les sujets que nous apprécions ou auxquels nous souscrivons. Et cela, au détriment de ceux qui seraient susceptibles de remettre en cause nos croyances.
On se retrouverait alors enfermé dans ce que Pariser appelle une « bulle de filtres ». Un état « d’isolement intellectuel et culturel » décrit comme moteur dans les choix que nous faisons et les décisions que nous prenons à titre privé. Notamment dans ce cas précis, lorsqu’il s’agit de notre engagement politique. L’élection en 2016 du président américain Donald Trump, évènement perçu comme « parfaitement inattendu » par (presque) toute la frange pro-Démocrate de la population mondiale, posait notamment la question suivante. L’algorithme de Facebook a-t-il, cette année-là, divisé l’Amérique en deux planètes — Démocrate et Républicaine — qui ignoraient tout l’une de l’autre à tel point que la première ait été incapable de prédire la victoire de la seconde ?
Si elle a depuis été étayée par la prise en considération d’autres mécanismes. Tels que l’attirance de l’Homme pour ses pairs ou le concept de « chambres d’écho », cette théorie n’en reste pas moins confirmée aujourd’hui par les faits. Les algorithmes de nos réseaux sociaux préférés sont programmés pour apprendre de notre comportement. Dans le cas d’Instagram, ils nous proposent donc quotidiennement les photographies qui, selon les propres mots de la plateforme, « seront le plus susceptibles de nous intéresser. »
Basées sur le fameux concept du « Vous aimerez aussi », les propositions de comptes similaires sont une illustration parfaite de ce mécanisme. Très utiles lorsque vous êtes à la recherche d’une forme spécifique de contenu. A contrario, elles le sont beaucoup moins lorsqu’il s’agit d’élargir le spectre de vos inspirations en matière par exemple de photographie outdoor. Car les comptes se suivent et se ressemblent, souvent comme deux gouttes d’eau.
Parce qu’ils répondent aux critères de la nouvelle photographie outdoor symétrique, mystérieuse ou sensationnelle. Le pont suspendu de Capilano à Vancouver et le mug en inox de votre meilleur ami vont générer plus d’engagement. Remonter en haut de la pile et ainsi donner envie à de nouveaux photographes de réaliser des prises de vue similaires. Sans même en être toujours conscients, ils vont choisir une situation, un cadre ou une retouche particulière pour générer un maximum de réactions de la part de leur propre communauté. Et la boucle sera bouclée.
Le compte @insta_repeat, référence les copycats les plus récurrents de la sphère outdoor sur Instagram. Il présente d’ailleurs le plus souvent des photographies identiques mais prises dans des environnements différents. Par exemple, la vue à la première personne d’un paysage depuis l’intérieur d’une tente ou la symétrie parfaite d’une route perçant vers l’horizon. Ce qui nous donne un nouvel élément de réponse. L’esthétique du contenu posté ne dépend plus uniquement de l’endroit que l’on visite, mais bien de la manière dont on communique sur son expérience. Devenu un des leviers de notre ascension « sociale », le voyage est alors « pleinement » vécu deux fois. Une première fois sur place et une seconde au moment de récolter les fruits de notre post Instagram.
Ajoutez à cela la vocation première du réseau social qui, loin d’être une plateforme réservée au contenu artistique. Héberge également — et majoritairement — des contenus personnels censés renseigner nos proches sur notre activité quotidienne. Au final, vous obtenez 2,3 millions de posts sous le hashtag #Yosemite.
En haute saison, les touristes sont sept fois plus nombreux en Islande que les Islandais eux-mêmes.
Le risque, du point de vue du spectateur, est de faire un jour ce qu’il conviendrait d’appeler un « outdoor burnout ». Un trop-plein d’horizons merveilleux et de routes inspirantes, capables par un phénomène d’accumulation de supprimer toute saveur relative à la contemplation d’un paysage magnifique. Une question se pose notamment. Serait-il possible d’avoir eu un jour accès à suffisamment d’images d’un pays ou d’une région donnée que sa visite in persona puisse nous sembler superflue ?
Parce qu’elles ont été propulsées sur le devant de la scène à une vitesse particulièrement folle. Certaines régions du monde pourraient en tout cas être menacées plus vite que d’autres par ce phénomène. Le cas de l’Islande, notamment, est particulièrement parlant. Mise sous le feu des projecteurs par l’éruption de l’Eyjafjallajökull en 2010. La petite île perdue dans l’océan Atlantique Nord a connu depuis une croissance de son affluence touristique d’environ 30 % par an (40 % en 2016). En haute saison, les touristes sont aujourd’hui sept fois plus nombreux sur l’île que les Islandais eux-mêmes (2,3 millions contre 330 000 en 2017).
Il faut dire qu’il est difficile de résister à ses geysers qui parsèment le territoire comme un gruyère, ses 130 volcans actifs et ses étendues polaires à perte de vue. La « terre de glace » n’a eu aucun mal donc, à enfiler sa casquette de terre promise de l’aventure. Cet environnement contrastant entre le bleu glaçant des icebergs et le noir profond des plages de sable offre un spectacle saisissant. Il dote l’île d’un potentiel photogénique incroyable dont les nouvelles stars de la prise de vue digitale ont su tirer profit.
En 2016, le photographe américain Chris Burkard — 3,2 millions de followers sur Instagram — y avait déjà entrepris près d’une trentaine de voyages, affirmant qu’elle était « l’un des plus beaux endroits sur Terre ». Il affirmait aussi qu’on ne lui connaissait « pas de rival pour ce qui est de la photographie. » Les articles présentant la liste des « 15 influenceurs islandais à suivre pour nourrir son inspiration » sont pléthore sur le web et les paysages de l’île sont aujourd’hui saupoudrés dans les feeds de tous les passionnés de voyage, d’aventure et de photographie, de l’avion de Sólheimasandur aux chutes de Seljalandsfoss en passant par les reliefs enneigés du Landmannalaugar.
Depuis tout petit, j’avais le rêve de voir un jour l’Islande. Cet îlot perdu où l’on peut « se baigner dans des bains brûlants au beau milieu de la banquise. » Pourtant, parce que j’aime beaucoup Chris Burkard et sans doute aussi parce que, disons-le, nous avons nous-même chez Les Others accordé une part généreuse de notre gâteau éditorial à ce pays ces dernières années; cette envie n’est plus la même aujourd’hui. Elle n’est plus la même parce que j’ai le sentiment, je crois, d’en avoir « déjà trop vu ». Or, le plaisir de la découverte n’est-il pas le sel de l’aventure ?
Heureusement, je sais aussi que je me trompe, que les clichés de Chris, Benjamin Hardman ou de leurs centaines de « comptes similaires » ne pourront jamais remplacer la réalité du terrain et qu’il faudra un jour que je voie l’Islande de mes propres yeux. Mais le sentiment décrit est bien présent, c’est plus fort que moi. Internet, sur ce coup-là, a été plus fort que moi.
À la manière de la carrière fulgurante d’une pop star, les réseaux sociaux seraient-ils capables de rayer une région du monde de la carte aussi vite qu’ils l’avaient élevée au rang de territoire immanquable ? Les articles prédisant l’éclatement de la bulle touristique islandaise fleurissent en tout cas un peu partout sur le web et les projections de croissance d’affluence pour 2018 et 2019 parlent déjà d’elles-mêmes (respectivement 5 et 7 %, soit un retrait de près de 25 % par rapport à 2017).
Dans la brume matinale islandaise, une alternative à cette fatalité apparaît, celle d’appréhender le voyage autrement. Puisque l’on peut tout « voir » en un clic. Il s’agirait désormais de voyager pour « vivre » une véritable expérience. Celle de dépasser ses limites sur un itinéraire particulier, de s’immerger au plus proche d’une population ou de s’engager en marge de son voyage dans un projet environnemental. Après l’observation, l’action : ne serait-elle pas là, la nouvelle recette de la découverte ?
Puisque l’on peut tout « voir » en un clic, il s’agirait désormais de voyager pour « vivre » une véritable expérience…
Du point de vue du photographe, qu’il soit professionnel ou amateur, les risques induits par le fait de suivre aveuglément la tendance — en empruntant les sentiers les plus battus ou en capturant des situations déjà existantes — sont pluriels.
Le premier, relevant de son expérience personnelle, serait de transformer une aventure vécue pour soi en une exposition ouverte au public. exposition à laquelle on aimerait naturellement que le maximum de monde réponde présent. La chercheuse américaine Alixandra Barasch, professeure à l’université NYU Stern de New York, a réalisé en 2017 une étude sur des groupes de visiteurs d’une sélection de sites touristiques dans la région de Philadelphie. Elle a révélé que « la prise de photos dans l’intention de les partager sur les médias sociaux diminue la jouissance de l’expérience vécue, en augmentant l’anxiété et la préoccupation liée à la présentation de soi ou de son sujet devant une communauté. »
Le second est de laisser filer les opportunités créatives qui s’offrent à lui en s’inscrivant les yeux fermés dans un courant déjà existant. Sous prétexte que ce dernier a prouvé sa valeur au like-o-mètre. Car s’il est fort probable que cette tactique fonctionne à court terme. Les chances de sortir du lot dans un océan de contenus similaires sont quasi nulles.
Le dernier, plus grave encore, relève du respect de l’environnement dans lequel le photographe outdoor évolue. Un environnement paradoxalement menacé par les personnes qui le mettent le plus en avant.
Un peu partout dans le monde, des spots et parfois même des régions entières, pourtant prisés par les aventuriers pour leur propension à offrir l’incroyable frisson de la découverte, sont devenus en quelques années à peine les victimes de leur succès digital. Le Devil’s Bathtub, en Virginie, en est un bon exemple. Cette nouvelle star d’Instagram était une piscine naturelle quelconque des forêts nationales de George Washington et de Jefferson jusqu’à son apparition sur la plateforme en 2015. Aujourd’hui, le site est passé d’une dizaine de visiteurs quotidiens en haute saison à plus de quatre cents, selon le Service des Forêts des États-Unis.
Certains clichés les plus en vue de la sphère digitale sont même tout simplement immortalisés dans des zones interdites d’accès par les autorités, le plus souvent à des fins de protection de la nature mais aussi, dans certains cas, de l’Homme lui-même. Un feu de camp improvisé au milieu d’un parc national, un selfie pris à quelques mètres d’un animal sauvage ou un survol en drone au-dessus d’une zone protégée sont autant de situations nouvelles, parfois créées de toutes pièces par le photographe et immortalisées pour le simple fait d’avoir été jugées « instagrammables. »
En 2016, la ranger Christina Adele Warburg du Parc national de Grand Teton dans le Wyoming aux États-Unis, rédigeait un message d’alerte sur son blog alors que la publication d’un campeur installé au bord de l’eau avec un brasier fumant à ses côtés venait de dépasser les dix mille mentions « like » sur Instagram. À l’échelle d’un réseau social de cette envergure, capable en quelques ricochets d’influencer le comportement de millions de personnes, les répercussions sur les écosystèmes peuvent se faire sentir à court, voire à très court terme.
Car juste au-dessus de cette photo, dans la partie réservée à la localisation, on pouvait lire en petit et en gris : « Schwabachers Landing ». En un clic, on avait alors accès aux coordonnées GPS de cet embarcadère. Situé selon Wikipédia « à quelques miles au sud de Snake River Look, le long de la rive est de la rivière Snake, dans le Parc national de Grand Teton. » Un exemple parmi mille qui pose la question de la responsabilité liée à la géo-localisation systématique des espaces visités. Si Schwabachers Landing est déjà particulièrement connu des touristes dans cette région. Les endroits les plus photogéniques à travers le monde sont souvent les moins fréquentés, et donc les plus fragiles.
Est-il vraiment raisonnable de divulguer, par souci d’égo, d’altruisme ou en quête de likes, les coordonnées des superbes photos que nous partageons sur les réseaux sociaux ? Ou devrions-nous au contraire les garder pour nous, afin de protéger la fragilité de l’endroit et faire en sorte que les espaces extérieurs restent des lieux de découverte et d’exploration ?
Le paradoxe qui consiste à vouloir que davantage de gens profitent du plein air tout en préservant sa nature sauvage n’est pas nouveau.
L’organisme américain Leave No Trace, qui se bat pour « protéger les petits et les grands espaces en enseignant et en incitant les gens à en profiter de manière responsable », a lancé en 2016 un appel aux sportifs, photographes et influenceurs du monde entier en leur demandant d’arrêter de géo-localiser leurs escapades. Dans un billet intitulé « New Social Media Guidance » (« Une nouvelle orientation pour les réseaux sociaux »), ils écrivent notamment :
Marquez judicieusement [vos contenus] : évitez de marquer (ou de géo-localiser) des emplacements spécifiques. Identifiez plutôt un emplacement général tel qu’un État ou une région, selon la situation. Bien que le marquage puisse sembler innocent, il peut avoir un impact important sur les lieux que vous visitez.
Ce paradoxe, qui consiste à vouloir que davantage de gens profitent du plein air tout en préservant sa nature sauvage, n’est pas nouveau. Le journaliste du Seattle Times Ron Judd, qui a rédigé une demi-douzaine de guides sur le camping et la randonnée dans le Nord-Ouest Pacifique — région du monde particulièrement appréciée des voyageurs 3.0 et donc concernée par la problématique actuelle — expliquait en 2017 à Outside : « Lorsque des guides papier ont fait leur apparition dans le monde de l’outdoor dans les années 1960, certains se sont opposés à cette nouvelle démocratisation, affirmant que les auteurs aiguillaient trop de gens vers des endroits dont la localisation représentait un secret durement gagné. » Pour leur défense, la plupart des auteurs concernés avaient argumenté à l’époque que « l’afflux de touristes dans ces régions créerait une nouvelle circonscription d’électeurs » qui contribueraient à la conservation des espaces sauvages.
Et le débat est toujours d’actualité en 2018. La nouvelle attractivité des parcs nationaux et plus généralement la mise en avant de la nature et des pratiques outdoor permettent sans doute, c’est vrai, de déclencher une prise de conscience environnementale chez toute une génération de citadins nés et élevés en ville. C’est d’ailleurs l’un de nos principaux moteurs chez Les Others. Reconnecter l’Homme à la nature en lui donnant envie de partir à l’aventure. Mais force est aussi d’admettre que les années 60 sont loin et que les effets décris par les détracteurs du guide papier sont décuplés aujourd’hui par nos plateformes sociales. À titre d’exemple, les livres de Judd s’écoulaient à l’époque à 40 000 exemplaires en cinq ans. « De nos jours, dit-il, vous pouvez concentrer le regard de 40 000 personnes vers un seul endroit en seulement cinq minutes. »
Le compte Instagram du Parc national de Glacier, dans le Montana, comptait près de 700 000 followers en octobre 2018. Une caisse de résonance qui en dit long sur la fréquentation annuelle de l’endroit, mais qui permet aussi à l’équipe en charge du site de « maintenir le contact » avec ses visiteurs. Tout en les sensibilisant aux bonnes conduites à adopter dans un environnement naturel. En 2017, le Parc national de Yellowstone lançait de son côté #YellowstonePledge, une campagne visant à renforcer le sentiment d’appartenance des visiteurs au parc en leur proposant de prendre une série d’engagements (« Ne jamais approcher d’animaux sauvages pour prendre une photo », « Rester sur les bandes prévues à cet effet dans les zones thermales », etc.) et de sceller publiquement leur décision en partageant le hashtag sur Instagram.
Utiliser la puissance du digital pour répondre aux externalités négatives qu’il a lui-même créées. Voici le plan de bataille de cette nouvelle génération de responsables environnementaux. Montrer la nature pour mieux la protéger. S’en inspirer pour mieux créer. L’admirer pour mieux agir. Une approche intéressante qui nous renvoie à notre propre impact social et environnemental, nous aventuriers, photographes, journalistes ou sportifs, professionnels ou amateurs, et amoureux du grand air.
Retrouvez cet essai dans Les Others Volume 8. Et pendant qu’on y est, rejoignez-nous sur Instagram : @lesothers (on tente de faire bouger tout ça, même s’il peut nous rester de mauvais réflexes, parfois…)
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