Après nous avoir raconté son trip de 3 jours dans les montagnes du South Chilcotin en Colombie britannique et sa randonnée vers le sommet du Grand Veymont, dans le Vercors, Sébastien Mas revient avec une aventure en Norvège, sur les îles Lofoten, entre petits villages aux maisons colorées et nuits sous la tente par 0 degrés.
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Me voilà à Bodo, au Nord du cercle polaire. Cette petite ville qui borde la mer de Norvège voit partir les bateaux vers les îles Lofoten, au Nord-Ouest. Je profite de cette courte escale pour faire quelques provisions.
La traversée dure un peu plus de 3 heures et me permet d’étudier la carte pour décider de mon point de chute de ce soir. Le bateau accoste peu après 19h30. Le soleil de minuit de cette fin du mois de mai m’invite à une ascension tardive. Elle commence légèrement au Sud de la ville de Å. Je suis seul ici et n’ai croisé personne depuis la fin de ma traversée. Au fur et à mesure que je monte, je longe des lacs qui approvisionnent les villages en contrebas en eau potable.
Après quelques heures de marche, j’entrevois le replat de Monkebu sur lequel je décide de bivouaquer. Je marche maintenant depuis plus d’une heure dans la neige, qui recouvre le terrain où j’espérais planter ma tente. J’opte pour un carré d’herbe encore préservé qui me permettra de gagner quelques degrés, mais ça ne suffit pas à m’isoler du froid !
J’assiste émerveillé à la chute de blocs de glace sur la montagne en face. Ils se détachent dans un grand fracas et viennent s’écraser dans le lac encore gelé. L’endroit est isolé mais pas si silencieux ! Ces grondements me tirent de mon sommeil plusieurs fois dans la nuit.
Le lendemain matin, je retourne vers le port. Il y a un bateau en partance pour l’île de Vaeroy dans la journée. Il faut saisir cette opportunité, le prochain n’est que dans quelques jours. J’arrive en fin de matinée sur l’île, à l’extrémité Sud des Lofoten. Il y a un seul village d’à peine 700 habitants. Et encore, le dernier recensement date d’une dizaine d’années.
À pied, je prends la direction du Nord de l’île pour trouver un endroit où passer la nuit. Il n’y a pas âme qui vive. Je plante mon campement sur une plage isolée. L’île n’est pas très haute, il n’y a donc plus de neige. La température n’excède cependant pas les 10 degrés la nuit. Le vent vient déterrer à plusieurs reprises les piquets plantés dans le sable. Mon poids fera l’affaire pour maintenir la tente en place.
Au réveil je laisse une grande partie de mon équipement sur la plage. J’ai besoin d’avancer plus rapidement aujourd’hui et le poids du matériel reste un fardeau sur ce terrain accidenté. Je me rends à Mostad, un village de pêcheurs, abandonné depuis près de 40 ans. Je profite des hauteurs pour prendre quelques clichés surplombant le village niché dans une crique.
Le soir, de retour sur mes pas, je décide de déplacer le campement 2 km plus au sud pour profiter d’une nouvelle vue au réveil. Il est plus de 21h et il fait encore grand jour. J’en profite pour grimper une hauteur en face de moi et découvre un panorama superbe sur le reste de l’île et sur un aérodrome abandonné.
Le lendemain je reprends le ferry en direction Nord pour revenir à la ville de Å. Au menu de l’après-midi : l’ascension du fameux sommet de Reinebringen. La pancarte qui balise l’entrée du chemin met tout de suite en condition. La voie est fortement déconseillée par les autorités locales, l’entrée se fait aux risques et périls du randonneur.
Il est encore un peu tôt dans la saison, le terrain est partiellement couvert de neige et de boue. Je devine quelques silhouettes sur le parcours : aucune excuse pour ne pas grimper ! Et je ne regrette pas mon choix : la vue sur la ville de Reine, entourée d’une eau turquoise, est magnifique.
Après une nuit bien fraîche, je prends la direction du petit embarcadère de Reine. Les nuages sont bas et un fin crachin tombe. Je décide de reporter mon départ pour l’Ouest vers Horseidvika. Cette plage n’est accessible que par bateau et il ne fait qu’une rotation par jour. L’idée de rester bloquer une journée sans abri sous ce temps-là ne m’enchante guère. Le lendemain, la coquille de noix qui peut transporter jusqu’à 20 personnes me débarque à Kirkefjord.
Je gagne l’extrémité Ouest de l’île en quelques heures à travers les marécages. Les intempéries d’hier y sont pour quelques chose mais quelle joie d’avoir une immense plage rien que pour soi ! Les falaises des fjords tombant dans la mer sont toujours aussi impressionnantes. Je passe une nuit paisible au son des vagues de la mer de Norvège.
Le lendemain, je prends mes précautions pour ne pas manquer l’unique bateau de la journée. En attendant sur la jetée, un homme d’un certain âge vient à ma rencontre. Nous engageons la conversation. Je comprends rapidement qu’il est du coin et qu’il vient de temps à autre se ressourcer loin de tout. Il est né ici, dans ce hameau d’une vingtaine de maisons. Aujourd’hui, plus personne n’y habite à l’année. Le seul moyen d’accès reste le bateau et l’hiver y est rude : de la neige jusqu’au genou et une nuit polaire qui ne se lève jamais pendant 2 mois de l’année.
Je regagne l’île principale avant de faire route plus au Nord. J’atteints le village de Nusfjord et comprends tout de suite pourquoi il est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO : des maisons sur pilotis, une mer turquoise, un havre de paix. J’escalade les hauteurs environnantes pour trouver un nouvel angle de vue et profite de l’arrivée d’un vieux gréement. Intrigué, je me rapproche de l’équipage pour en apprendre un peu plus. Il s’agit de « la Fleur de Lampaul », qui a notamment servi dans les campagnes de la fondation Nicolas Hulot. Aujourd’hui, il transporte des touristes de fjords en fjords. Ces derniers sont surpris d’apprendre que je n’ai que ma tente pour passer les nuits entre 0 et 10 degrés…
Mais avec un bon sac de couchage, le tour est joué !
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